Familles en crise. Approche systémique des relations humaines. Résumé de quelques chapitres du Livre de Rougeul Françoise

J’aurais pu me contenter de commencer l’article par la partie traitant des cycles vitaux de la famille, mais j’ai trouvé intéressant de reprendre quelques notions qui pour moi étaient clairement expliquées et illustrées dans ce livre.

Chapitre 1 : Approche systémique et systèmes humains.

Dans la théorie générale des systèmes, on retrouve trois principes fondamentaux du fonctionnement des systèmes :

  Le principe de Totalité :
Un système est un tout non décomposable en ses éléments. Comme la famille obéit au principe de totalité, les prises en charges individuelles deviennent contradictoires avec une vision systémique de la famille.

  Le principe de non sommativité :
Un système est autre chose que la somme de ses éléments. Un système peut fonctionner indépendamment des éléments qui le constituent.

  Le principe d’autorégulation :
Un système ouvert possède des mécanismes lui permettant de maintenir un état stable si l’environnement change. L’autorégulation est de type rétroactif.
On distingue deux types de feedback. :

1. Le feedback négatif : corrige l’action des facteurs externes et internes qui pourraient modifier l’équilibre et tend à conserver les systèmes dans un état stable.

2. Le feedback positif : accentue l’effet des facteurs perturbateurs et tend à déstabiliser le système : les tensions créées deviennent trop fortes entrainant un changement d’état stable.
La stabilité d’une famille est assurée par des mécanismes de rétroactions négatives. Les règles familiales assurent le fonctionnent de la famille.
Dans une famille de type hiérarchique, les règles se découvrent au moment de leur transgression (rappel à l’ordre). Ces règles découlent du mythe familial.
Selon Ferreira, le mythe est un ensemble de croyances partagées par chaque membre de la famille. Il lui donne son identité. C’est l’image que la famille se donne d’elle-même.
En tant que système, la famille a la capacité de changer les anciennes règles inadaptées.
Permanence et changement sont nécessaires à la survie du système familial. L’autorégulation peut aussi échouer. Un système se rigidifie par la prédominance des feedback négatifs ou s’emballe et explose influencé par les feedback positifs.
Il arrive que la famille ne parvienne pas à changer de fonctionnement. Les tensions augmentent et sont absorbées par l’apparition de symptômes. Exemple : un retard scolaire peut cristalliser les tensions familiales sur l’apparition de la sexualité chez les adolescents, leur gardant un statut d’enfant.
La pathologie devient l’expression d’un dysfonctionnement familial, et le patient désigné est alors celui qui se montre capable de porter les tensions du système.
Considérer la famille comme système vivant, c’est la croire susceptible de s’autoréguler. Le travail des thérapeutes consistent donc à réveiller cette capacité de transformation.

3. Equifinalité

Un état stable dans un système ouvert ne dépend pas des conditions initiales. Il est déterminé par les paramètres du système selon Von Bertalanffy.
Dans la thérapie familiale une même fin peut être obtenue à partir d’états initiaux différents.
L’importance de l’histoire se trouve relativisée au profit de la structure d’interaction actuelle. On retrouve souvent une enfance très difficile dans le cas de pathologie sociale mais des individus très perturbés peuvent avoir eu une enfance normale.
Le principe d’équifinalité influe sur la délimitation du système familial. On considère comme système opératoire, ce qui s’est constitué autours du patient désigné. (Pas forcément toute la famille et pas forcément uniquement la famille).
Le principe d’équifinalité conditionne la manière d’aborder le problème. Il s’agit plus de comprendre le fonctionnement de la famille actuelle que de chercher la cause des troubles dans l’histoire et les motivations individuelles : le « pourquoi c’est arrivé » devient le « comment ça fonctionne ».

La Thermodynamique du non-équilibre ou des systèmes à l’écart de l’équilibre.
Selon Prigogine, l’équilibre d’un système organisé en état stationnaire est constamment soumis à des perturbations qui le font fluctuer ; les fluctuations sont corrigées par les mécanismes de feedback positifs et négatifs. Lorsque le système s’écarte de l’équilibre, les fluctuations tendent à faire basculer le système vers un nouvel état d’équilibre.
Dans une telle démarche de déstabilisation, les thérapeutes accompagneront le système familial dans une escalade d’état de non-équilibre.

L’Auto-organisation

Elle est un cas particulier d’autorégulation appliqué au système vivant. Un système vivant s’auto-organise en fonction d’un but : la survie du système. Exemple : dans un hôpital, en cas d’erreur médicale les médecins peuvent faire bloc.
Un autre aspect de l’auto-organisation est la tendance à produire plus d’ordre. La seule issue est l’introduction d’un désordre. Exemple : si les grandes catastrophes ne détruisent pas le système, elles amènent un renouveau.

Chapitre 2 : La communication normale et ses aléas

C’est l’équipe du Mental Research Institute de Palo Alto qui a placé l’étude de la communication au centre de la recherche en psychiatrie. On doit ces recherches pionnières à un groupe placé sous la direction de Gregory Bateson (anthropologue), J. Haley (étudiant en communication), John Weakland (ingénieur chimiste), William Fry et Don D. Jackson (psychiatres), Paul Watzlawick (psychologue, psychanalyste jungien).

Selon Watzlawick, l’homme a besoin de communiquer avec autrui pour parvenir à la conscience de lui-même.

Les 5 axiomes de la communication par Watzlawick, Jackson, Helmick, Beavin sont :

  Axiome 1 : On ne peut pas ne pas communiquer.
En thérapie de couple, par exemple, accuser un des époux d’être non communicant est un contre-sens, sa position passive-agressivelui permet de communiquer son agressivité à l’autre.

  Axiome 2 : Le contenu et la relation

Bateson utilise les termes d’indice et d’ordre. Un message (indice) transmet une information contenue dans le message. L’ordre désigne la manière dont le message doit être compris et la relation entre les partenaires.
Il est plus important de répondre au niveau relationnel (écouter la souffrance et le désarroi d’une personne sans se substituer à elle) pour lui éviter l’impression de n’avoir été ni comprise ni entendue.

  Axiome 3 : les deux modes.

Le message digital ou de niveau 1 transmet une information à laquelle on peut répondre par vrai ou faux. L’information transmise par le message analogique ou de niveau 2 concerne la relation entre les deux partenaires. Il est véhiculé le plus souvent par le comportement : ton de la voix, débit, silences, regards, mimiques, attitudes, gestes … et donne son sens au message digital.
Cette communication sur la communication est appelée métacommunication. Une difficulté du langage analogique est l’absence de négation. Exemple : Il est plus difficile de signifier « Je ne veux pas attaquer » que le contraire.
Les messages analogiques sont des propositions concernant les règles futures d’une relation à définir. Pour Bateson, Je peux proposer amour, haine ou combat mais c’est l’autre qui y attribue une valeur de vérité. Exemple : une épouse qui reçoit un cadeau de son mari peut tenir plusieurs discours : « Il m’aime ; Il veut se faire pardonner ; Il veut me quitter ».

  Axiome 4 : Ponctuation de la séquence des faits

La nature d’une relation dépend de la ponctuation des séquences de communication entre les partenaires.
W. prend le cas d’une dispute de couple où l’homme se replie et la femme est hargneuse.
Chacun ponctue : Elle : « Il se replie donc je suis hargneuse ». Lui : « elle est hargneuse donc je me replie ». Chacun pense que son comportement est induit par le comportement de l’autre sans voir le coté inducteur de son propre comportement. Il s’en suit des conséquences pathologiques : Jeux sans fin, conflits insolubles, victimisation …
Lui : « si je veux la paix, je laisse faire ma femme ». Elle : « j’aurais aimé que tu aies plus d’initiative. Tu t’en es toujours remis à moi pour tout ». La victime ne voit jamais en quoi les comportements dont elle souffre sont induits par ses propres comportements. Cette ponctuation lui évite de se remettre en question. Or, il ne dépend que de nous de changer, car si je change, l’autre va changer.

D’après W., une assistante de direction humiliée par un de ses supérieurs prenant envers lui une attitude encore plus condescendante lors de vexations. W. lui propose de parler de son excitation sexuelle quand il la traite de la sorte. A la séance suivante, son patron avait déjà changé d’attitude avant qu’elle n’intervienne.

  Axiome 5 : Tout échange de communication est symétrique ou complémentaire, selon qu’il se fonde sur l’égalité ou la différence.

C’est à partir de l’observation de la tribu des Iatmuls en Nouvelle Guinée que Bateson se pencha sur les notions d’interactions symétriques et complémentaires.
L’interaction symétrique se caractérise par une minimisation des différences. Chacun répond à l’autre par le même type de comportement.
Dans l’interaction complémentaire, il y a maximisation des différences. L’un occupe la position haute ou supérieur et l’autre la position basse et inférieur. (Mère-enfant, enseignant-élève, médecin-malade).
C’est toutefois une erreur de penser que la position basse est faible. Il n’y a pas plus bas que le nourrisson, or toute la vie du couple s’organise en fonction de lui.
Symétrique ou complémentaire ne sont ni bonne ni mauvaise. Ce qui est pathologique c’est la rigidification d’une de ces modalités d’interaction.
SI la définition de la relation n’est jamais remise en cause, elle est incapable d’évoluer.

Hiérarchisation de la communication.

La communication contextuelle de niveau 3.
Un message est correctement interprété et identifié dans son contexte. Chaque individu appartient au contexte de sa famille d’origine, de son milieu professionnel, du lieu où il habite, de sa langue, de sa culture.
Bateson (1952) applique la théorie des types logiques (1913) de Russel et Whitehead aux théories de la communication. Il existe selon les auteurs la même discontinuité entre les messages qu’entre la classe et les membres. Cette théorie pose l’existence d’une discontinuité entre message de niveaux différents auxquels on attribue un type logique différent. Le non-respect de cette continuité entraine des paradoxes de la communication ou communication paradoxale.

Les communications paradoxales.

Un type de message contient sa propre contradiction. Le paradoxe d’Epiménide le crétois « Tous les crétois sont des menteurs » : s’il ment, il dit la vérité ; S’il dit la vérité, il ment. La différence entre énoncé contradictoire et paradoxal, c’est que dans le second, il n’y a pas d’issue possible. Enoncé contradictoire : « je dis la vérité et je mens ».
Dans Principa Mathématiqua, Russel en 1913 en collaboration avec Whitehead construit la théorie des types logiques : Une classe ne peut être membre d’elle-même parce que classe et membre sont d’un type logique différent.
Injonctions paradoxales et cercle vicieux. « Souriez ! Soyez naturel ! Tu devrais m’aimer, aime ton travail, sois autonome, pense par toi-même, impliquez vous, … » Tous ces paradoxes sont des variations du « soyez spontanés ». Si je suis spontané, j’obéis donc je ne le suis pas et si je ne le suis pas, je n’obéis pas donc je le suis.
En conclusion, on peut dire que les paradoxes engendrent une paralysie de l’action, la seule issue consiste donc à sortir du cadre fixé par le paradoxe pour déceler la contradiction cachée.

Le double lien.

De 1952 à 1962, G. Bateson dirige le projet pour l’étude de la communication dans la schizophrénie. En 1956, avec Jackson, Haley et Weakland font l’hypothèse qu’elle est le résultat d’une interaction familiale où le schizophrène souffre d’une grave perturbation de son système de métacommunication. Il ne peut coder correctement les messages reçus, ceux qu’il émet et la rétroaction interne (pensée, perception, affect). Selon les auteurs, les modèles séquentiels dans l’expérience externe du malade sont responsables de ses conflits internes de classification logique ; ce type d’expérience insoluble est appelée double-contrainte. Ce qui apparait comme trouble de communication chez un schizophrène est considéré comme une réponse adaptée des séquences communicationnelles spécifiques. Le patient est vu comme un expert de communication particulier « le double lien ».
Pour Bateson, 6 ingrédients sont nécessaires : deux personnes, répétition de l’expérience qui constitue un apprentissage, une injonction négative primaire par le langage dans un contexte de menace, une injonction négative secondaire qui la contredit à un niveau plus abstrait et une qui interdit à la victime d’échapper à cette situation ; Toutefois, lorsque la double contrainte est perçue tous les éléments ne sont plus nécessaires.
L’individu pris dans un double lien se trouve dans une situation intenable, obligé de répondre aux injonctions sans réponse adéquate possible.
Que peut faire un enfant auquel la mère dit de venir l’embrasser en ayant un mouvement de recul quand il s’approche. Son système de métacommunication est anéanti par d’eutéro-apprentissage (apprendre à apprendre). Il pourra se défendre en cherchant un sens caché, en acceptant le sens littéral, en coupant toute communication. Le schizophrène traite les mots comme des choses. Devenir un expert dans un contexte de double lien rend le sujet inapte à la communication normale.
Il est impossible de repérer un double lien au cours d’un entretien mais il est toutefois possible de le soupçonner.
Dans « la contrainte interne réciproque » développée par Mony Elkaïm, chaque partenaire est soumis à une double contrainte interne. La demande et les reproches (programme officiel) sont en contradiction avec l’apprentissage relationnel de l’enfance (carte du monde).

Les pathologies liées au contexte.

  Les situations de désinformation expérimentale où le sujet est placé dans un contexte délibérément faussé. (caméra invisible). Une altération délibérée du contexte prive l’être humain de points de repère indispensable au fonctionnement de son intelligence.
  La méconnaissance des contextes d’apprentissage relationnel est un contexte souvent responsable de conflits du couple. Chacun est persuadé que son contexte va de soi. Exemple : Pour madame, la lune de miel est une occasion de pratiquer son nouveau rôle social. Pour monsieur, c’est une période d’intimité exclusive. Il a donc interprété le souhait de sa femme de discuter avec un autre couple comme un signe qu’il ne lui suffisait pas.
  La méconnaissance des codes culturels entraine aussi une situation de quiproquo dommageable. Dans « La Réalité de la Réalité », W. raconte l’impasse dans laquelle se sont trouvé les soldats américains et les jeunes anglais (40-45). Ils s’accusèrent mutuellement de manque de tact dans la sexualité. Pour le modèle Nord Américain, le baiser survient tôt, alors qu’il est considéré comme hautement érotique dans le modèle anglais.La proxémique a étudié les codes culturels qui régissent la distance corporelle (sociale, amicale, intimité) différents selon les cultures.

Les disqualifications transactionnelles.

Une transaction est l’unité de communication la plus simple. Le premier message émis possède un potentiel inducteur sur le second message en réponse au 1er. La disqualification se définit par l’incompatibilité entre la réponse de l’un et le contenu du message de l’autre (W.).
3 formes de disqualifications : la fuite ou changement de sujet, le tour de passe-passe (une réponse qui n’en est pas une), la litéralisation (« tu me traites comme un enfant ». « Mais tu es mon enfant. »).

Les mystifications

La divergence apparait entre ce qui est dit et les perceptions, sentiments ou intentions de l’autre. « Vous êtes fatigué ! Allez-vous coucher ! » Selon Laing, la personne mystifiée est trompée mais peu ou non se sentir trompée. Ce Phénomène est observé par Johnson dans les familles de schizophrène quand les enfants perçoivent la colère d’un parent qui nie s’être fâché. En croyant son parent, l’enfant maintient sa relation avec lui mais tronque sa perception de la réalité.

Conclusion : la fonction fondamentale de la communication concerne la définition de nous-mêmes que nous nous donnons réciproquement les un les autres. Le rejet provoque la souffrance, la colère le conflit permettant une meilleure définition de soi. Par contre le déni est lui toujours négatif, il suscite la confusion. Les contextes fondés sur le déni, comme le double lien, les disqualifications ou mystifications auront donc des conséquences pathologiques plus graves que ceux à base de rejet.
Venons en maintenant à l’essentiel de mon article : la famille en crise. J’y ai conservé la structure du livre par souci de clarté.

Chapitre 3 : Les cycles vitaux de la famille

Quel changement dans son fonctionnement une famille doit elle apporter au cours des différentes étapes de son cycle vital ?
Au bout de 5 générations, les souvenirs s’estompent et les valeurs se transforment. Chaque étape ou état stable est caractérisé par une organisation relationnelle. Le passage d’une étape à l’autre suppose une crise imposée par l’évolution des individus. Ces crises sont des moments fragiles propices à l’apparition de symptômes cristallisés sur un patient désignés.

1. La constitution du couple.

L’état amoureux met fin à la quête identitaire de l’adolescence. On assiste alors à une réduction des échanges. La famille ne compte plus. Les amis sont délaissés. Le travail ou les études en souffrent. Chacun dans le couple tire son identité de l’image que lui renvoie le regard de l’autre.

2. Le couple avec jeunes enfants :

  La grossesse met fin à l’illusion de la transparence et du semblable. Elle s’accompagne de transformations anatomiques et physiologiques qui se répercutent sur le psychisme. La femme a besoin de plus de sommeil et entre dans un état, selon Kanner, de « rêverie maternelle primaire ». La pensée et le rêve s’excluent selon Freud. L’homme et la femme vivent des réalités différentes. Si on ignore ces différences, des malentendus surviennent.
  La naissance du premier enfant teste l’unité du couple. L’univers relationnel s’agrandit brutalement. Il est difficile d’affirmer une identité de parents en étant aussi enfant de ses parents. Il convient donc de déterminer ce qui est le meilleur pour le couple. Mais il est difficile de trouver son identité de couple. Il faut délimiter une frontière entre la nouvelle famille et les familles d’origines d’une part, et entre les jeunes couples et la société d’autre part. Le savoir « Qui nous sommes » fait place au savoir « Qui fait quoi ». Un couple qui a de suite un enfant saute par conséquent une étape et rencontre alors des difficultés supplémentaires. Dans ce cas, l’enfant n’est en aucun cas un médicament pour un couple déjà en difficulté.
  L’arrivée du deuxième enfant apporte une autre difficulté. Il arrive que le premier enfant soit conçu pour dédommager les familles d’origine du départ d’un enfant ou pour les rassurer en continuant la lignée, pour le second, c’est différent (fatigue, soucis, disputes, projets,…)

3. Le couple avec les adolescents.

La puberté du premier enfant provoque une crise sur 3 générations. L’acquisition d’un corps d’adulte implique le deuil d’un corps d’enfant. Un autre deuil à faire, est celui de l’image idéalisée du parent tout aimant, tout puissant. La question de l’avenir se pose alors. L’ado peut se comparer, entrer en conflit, et s’affirmer. Pour savoir qui il est et ce qu’il vaut, l’adolescent s’identifie et se confronte à des figures idéales. Les ado les plus fragiles présentent des états dépressifs. Pour Flavigny, l’adolescence est une maladie qui peut être mortelle : 20 % passent à l’acte.

  L’âge bête. L’ado s’affirme par la revendication. Il recherche par l’opposition une limite qui lui permettra de se définir. La situation des parents devient alors paradoxales : rester à l’écoute d’une huitre qui vit toute question comme intrusive et toute réserve comme du désintérêt. De plus, ils doivent assurer sécurité et protection par des mesures vécues comme un contrôle intolérable. Mais le « Je te fais confiance » est aussi vécu comme abandon angoissant.

  L’adolescence familiale. A ce stade le couple se trouve déstabilisé en tant que couple conjugal et parental. La fonction des ados réintroduit alors un temps évolutif. D’une part, ils accélèrent le temps signifiant au parent qu’ils sont hors course. D’autre part, ils le ralentissent en se comportant comme des bébés. Ce double mouvement permet donc l’évolution de la famille.

4. Le nid vide ou deuxième mariage.

  Lors du départ des enfants, le jeune doit affronter la peur de : quitter le nid, l’avenir à construire, rater sa jeunesse, blesser ses parents, ou les laisser seuls. Si l’inquiétude est trop vive, il peut rester prisonnier. Le départ est une étape difficile pour toutes les familles. Dans les ruptures, il n’y a pas de réelle séparation, le lien reste. La haine tisserait des liens plus solides que l’amour. Selon S. Hirsch : « On part poliment par la porte ; si on part par la fenêtre, on est jamais parti ».
  Pour l’étape du deuxième mariage,il faut réapprendre à vivre ensemble. C’est l’heure du bilan, de la négociation. Les enfants acquièrent une identité de jeune adulte. Les parents se découvrent une identité de couple sans enfant à charge.

5. L’âge de la retraite et du désengagement.

  A la retraite, l’individu perd son identité de travailleur d’une part et ses collègues d’autre part. Pour sortir de ce deuil, il se trouve de nouvelles activités ou prend son temps. Le conjoint peut accepter la transformation. Mais parfois les hommes fondent une famille avec des femmes plus jeunes et les femmes demandent le divorcent. Les enfants peuvent aussi jouer le rôle de régulateur pour le conjoint abandonné.
  La vieillesse et mort des parents. C’est le moment où des conflits non-résolus vont se révéler. Beaucoup de maisons de retraite sont aussidépersonnalisantes pour les personnes âgées. La mort termine alors la phase et lui donne un sens. Il est utile à ce moment d’aménager la séparation en évitant la rupture.

6. Nouvelle famille.

Depuis le moyen-âge, l’église a toujours encouragé les veufs et les veuves à se remarier. Pourtant, la mentalité populaire considère les remariages comme une trahison du défunt époux et un abandon des enfants nés de la première union.
(Recherches anglo-saxonnes : la famille dissociée 1950-1960, la famille nucléaire comme la normalité, La famille reconstituée 1970-1980, la famille recomposée 1980).

Le beau-parent. Le parent non-gardien laisse place au beau-parent qui est autre chose qu’une substitution de l’autre parent.
• L’élection : selon I. Thery, « « on n’est pas beau-parent, on le devient. Ce processus est fondé sur une élection mutuelle en dépassant le rejet et la méfiance. Il y a passage d’une relation imposée à une relation acceptée.
• La liberté : en cas de rupture, le beau-parent n’a aucun droit sur l’enfant.
• L’autorité : Le beau parent n’a aucune légitimité de droit.
• Confidence et complicité : La relation « beau-parent, bel-enfant » est faite de rencontres complexes des valeurs de parentalités et d’amitiés. L’absence de statut clair est toutefois à la fois un handicape et un atout.
Conclusion : l’attitude ancienne « rester ensemble à cause des enfants » et celle plus actuelle « se séparer quand on ne s’aime plus » sont affaires de croyances et de choix individuels. F. Hurstel et C. Carré décrivent la décomposition familiale comme un cycle de transformation avec des temps de passage et des seuils à franchir. Séparations et divorces, enfant sous la garde d’un parent, intrusion du beau parent, mariage, naissance. « Chaque temps est une période sensible nécessitant des rythmes de passage et un travail psychologique (travail de deuil pour Freud). » I. Thery

Chapitre 4 : les mythes familiaux

Ce concept est inventé par A Ferreira pour rendre compte de sur quoi se fonde l’identité de la famille, ce qui lui permet de garder cohésion et identité tout en se transformant. La notion de mythe familial se rapporte à des croyances systématisées partagées par tous les membres de la famille concernant leur rôle mutuel dans la famille et la nature de leurs relations. Le mythe reflète l’image que la famille se donne d’elle-même.

  Règles rôles et valeurs familiales.

Ces règles organisent les relations entre les membres de la famille (système régi par des règles).Un rôle familial est un modèle abstrait, les valeurs sont au service des règles familiales. Ce sont les croyances du mythe familial qui déterminent les règles. Ex : dans une famille faire de la gymnastique pour rester en forme est toléré, alors que pratiquer du yoga est perçu comme une activité personnelle en contradiction avec le mythe de la femme dispensatrice de tout bien.
Les règles d’une famille se justifient par ses croyances. Notons que le mythe familial ne s’aborde pas directement en thérapie, mais on en trouve quelques éléments lors de la transgression des règles.

  Des familles et leurs mythes :

• La famille des morts vivants : Une famille marquée par la perte d’un homme prestigieux décédé d’une crise cardiaque avant 40 ans. La famille se présente alors comme souffrante et unie, les règles y sont : « il est interdit de dire du mal de quelqu’un de la famille, de savoir ce que les autres membres pensent, seule la communication rationnelle y est acceptable ». les mythes de cette famille sont :
  La fatalité et le sacrifice : personne n’a eu le choix, chacun subit maladie, échec, décès…
  La dévotion à la famille.
  L’indifférenciation : les individus y sont interchangeables, les vivants ne se différentient pas des morts (pouvoir).

• Sisyphe ou l’impasse familiale : Un père empêché par son père de faire des études, alors que le cadet a pu obtenir diplômes et statut social important, a fait de la prison. La mère, elle est orpheline à l’âge de 5 ans et s’est vue rejetée par son père. Le couple s’est donc structuré autour des thèmes d’échec et d’abandon ; dans le mythe familial du père, tout doit reposer sur lui. Actuellement le père oscille entre colère et effondrement. Les difficultés professionnelles et la remise en question de son autorité le précipitent vers le fond. La place du père s’effondre et la famille se désagrège. Si le mythe est détruit, plus de régulation interne, la famille perd de son identité.

  Fonctions du mythe familial : gardien de la cohésion familiale.
• Fondateur : il concerne les origines de la famille, ses valeurs essentielles. L’éventuel déviant ne peut que partir, sans quoi la cohésion du groupe en souffre.
• Prescripteur : il trace les frontières, délimite ceux qui appartiennent et les autres.Il définit une appartenance ; il permet à la famille de la reconnaitre sienne comme différente des autres. Il règle les relations avec l’extérieur : les valeurs et les croyances partagées au sein de la famille permettent son insertion au sein de la société. On trouve alors des effets désorganisateurs de l’acculturation qui prive les familles de leur système régulateur interne, les menant à une impasse.
• Il définit et justifie les rôles et fonctions de chacun : le mythe concerne les rapports entre les générations (respect des ainées, droits et devoirs des enfants, place à table,…).Il attribue les rôles au sein du couple et dans la famille (qui a le pouvoir ?). Il différencie les rôles en fonction de l’âge et du sexe (responsabilités es enfants, place de l’ainé, éducation des garçons/filles).
• Il prescrit la manière de vivre et d’exprimer les sentiments : « tout le monde est libre de faire ce qu’il veut », « chez nous on n’est pas coincés », « famille bisous ou pudique », colère interdite-tristesse permise (la dépression peut cacher une grande colère non exprimée. Et la colère peut dire que l’on est blessé.
• Il définit ce qui touche à l’avenir et à l’idéal (tout ce que la famille fait, est ou devient sans trahir son image ou ses espérances.
• Il constitue l’identité de la famille.
• Il a une fonction créatrice. Le mythe construit une structure permanente où les événements se réfèrent au passé, présent et futur. Le mythe est à la fois diachronique et synchronique. Le mythe pousse sur les manques, il sert à dénier d’insolubles contradictions. La dimension historique y est annulée et l’identité familiale écrase les identités individuelles.

  L’utilisation du mythe en thérapie et en formation.

• En thérapie, l’attaquer de front risque de provoquer la fuite de la famille. Il est par contre utile pour l’affiliation selon Minuchin (Le thérapeute se lie à la famille et la famille au thérapeute, l’affiliation comme le ciment invisible nécessaire au système thérapeutique). On note aussi que c’est au cours de la thérapie que se transforment ou s’abandonnent certaines valeurs du mythe.

• En formation : on peut travailler sur une image représentant sa famille d’origine. Ex : une grosse marmite pour les familles pot-au-feu (on est bien entre soi et le rapport à l’extérieur est plus difficile). Les familles père tranquille « pour vivre heureux, vivons cachés. » « L’amour, rien que l’amour » où les conflits sont bannis. Les familles militantes qui croient en sa tâche à remplir. Les familles « cour de récréation » où il faut s’amuser à tout prix. Les familles « hall de gare » où l’on ne fait que se croiser. Les familles « nid d’oiseau » tendres et protectrices ou « nid de vipère » ou chaudron de sorcière) où règnent maléfices, sentiments d’emprise et de haine.

On peut aussi travailler sur la reprogrammation familiale. Les ordres, les remarques, les interdictions pendant l’enfance (tout ce qui se disait avant 7 ans) dans les différents domaines relationnels :

  vis-à-vis des parents : « Tu discuteras quand tu seras grand », « Que veux-tu me dire ? », « Que veux-tu faire ? », « Tu dois nous aimer. » « Tu es trop petit pour comprendre. » ;

  avec la fratrie : « Tu dois être gentil. », « Battez vous mais ne vous tuez pas. », « Tu ne dois pas être jaloux. », « Ton frère (ta sœur), lui (elle) au moins, il (elle) … », « Ton frère peut, c’est un garçon. » ;

  Vis-à-vis de l’extérieur : « Ne te laisse pas faire », « Débrouille toi », « Ne parle pas à des inconnus » ;

  concernant la vie, la famille, l’avenir et le bonheur : « La vie, c’est magnifique / difficile », « Faut plus rêver quand on est grand. », « L’important est de faire ce qui t’intéresse », « Tu peux compter sur la famille. », « Il faut bien travailler à l’école pour avoir une bonne situation. », « Nous sommes une famille exceptionnelle » ;

  Dans le domaine des espérances et des projets : « Tu es né pour nous faire honneur. », « Sois heureux. », « Nous nous sommes sacrifiés pour toi. »

Ces deux exercices permettent de prendre conscience de sentiments et attitudes gênantes pour la pratique thérapeutique. Exemple : Un couple dont l’épouse femme-enfant dépassée, en face d’un thérapeute issu de famille militante, risque de se voir renvoyer des messages d’agacements. Un thérapeute d’origine famille « pot-au-feu » risque de militer pour une non séparation du couple. Or, le travail thérapeutique n’est pas de pousser le couple dans un sens, mais de l’aider à prendre conscience de ses possibilités, même pour se séparer. Les croyances du thérapeute jouent un rôle important dans la thérapie, en prendre conscience la rend plus objective. Il est donc intéressant que les thérapeutes travaillent sur leur mythe familial.

Pour conclure, on retrouve l’opposition de Korzybski entre « la carte et le territoire ». Les mythes ont quelque chose du territoire, mais ce sont des cartes. Ils nous permettent d’inventer avec la famille une construction susceptible de mobiliser les énergies bloquée de la famille.

Chapitre 5 : les différents types de crises et leurs issues

La crise est associée aux notions de passage et d’épreuve avec le thème de mort et de résurrection. La crise est un état instable qui appelle un autre état. La crise n’est pas une catastrophe (évènement imprévus qui entrainent des dommages matériels et des souffrances humaines importantes). L’urgence, elle, nécessite une intervention de soulagement. La crise par contre réclame une solution. Elle comporte des possibilités de réorganisation jusqu’à restructurer la vie entière de l’individu. Il arrive aussi que la crise s’accompagne de sentiments d’urgence et de panique mais ce n’est pas suffisant pour décider d’une urgence. Il est toutefois utile de voir si un soulagement de l’angoisse est nécessaire au traitement de la crise.
La crise selon Luigi Onnis est un carrefour, un croisement un nœud à partir duquel s’ouvre plusieurs voies (directions opposées, régression, stase, maladie, croissance, bien-être et santé). La crise est l’expression obscure et douloureuse de besoin de croissance et à la fois la désagrégation complète d’un ordre préexistant.
Pour Guy Ausloos, la crise est l’état du système où un changement va se produire. C’est par une crise que toute la famille passe d’une étape du cycle vital à une autre. Dans la crise, on note l’existence des perturbations réelles ou perçues, internes ou externes qui créent un déséquilibre privant le système de ses mécanismes de régulation interne et nécessitant une solution, un changement.

Pour l’école de Rome, il n’y a pas de changement sans crise. La provocation comme stratégie thérapeutique y est aussi choisie pour faire vivre en séance une crise à la famille. Les crises familiales peuvent être :

  situationnelles (provoquées par un événement déclenchant) ;
  développementales qui nécessitent un remaniement des rôles et des fonctions et une transformation de l’image de soi ;
  structurales (résultat de crises précédentes inachevées) où les dysfonctionnements s’accentuent, la tension et l’angoisse augmentent, les fonctions se rigidifient et la crise est permanente ;
  environnementales nécessitant une prise en charge tenant compte des réalités socio-économiques.

R. Pauzé propose un modèle d’intervention où la crise apparait quand on est confronté à des perturbations réelles ou perçues qui créent un déséquilibre, une défaillance des mécanismes de régulation et une augmentation du malaise. On va donc chercher pour quelles raisons certaines familles résistent et d’autres pas. On peut y voir plusieurs facteurs de vulnérabilité :

  Au niveau socio-économique qui influent sur les capacités d’adaptation au stress.

  Le réseau social de soutient qui permet de se sentir confirmé dans sa valeur et de percevoir la vie comme stable et prévisible. Le réseau permet de définir une situation stressante comme métrisable.

  Le répertoire des compétences adaptatives dépend de la fréquence de confrontation à des situations nouvelles et stressantes.

  Les vulnérabilités individuelles et familiales. Certains événements apparemment banals sont parfois vécus comme très stressants en raison de la similitude avec des évènements traumatiques vécus dans le passé.

  Le cumul des stress. Trop, c’est trop ! Selon Bateson, un individu confronté à de multiples demandes épuise sa souplesse d’adaptation limitant sa capacité à faire face à de nouvelles situations.

Le modèle de Pauzé est un modèle éco-systémique. Il prend en compte la famille et son environnement. Il hiérarchise différents systèmes :
  Le micro : constitué par les relations entre les systèmes auxquels l’enfant participe ;
  Le méso : comprend les relations entre systèmes auxquels l’individu ne participe pas alors que c’est le cas de la famille ;
  L’exo : désigne les conditions de travail des parents, les services publiques, le réseau social de soutient, …
  Le macro : constitué par les idéologies et les valeurs que la famille va adopter pour influencer le développement de l’enfant.
Il est intéressant de prendre en compte les différents systèmes et leurs interactions pour structurer l’intervention en plusieurs temps :
  Établir la chronologie des événements ;
  Identifier les facteurs de risques et leurs contributions à épuiser les capacités d’adaptation ;
  Identifier les types de crise ;
  planifier l’intervention.

Dans ce modèle, on note l’importance de la phase d’investigation préliminaire concernant le type de crise, ces facteurs déclenchant et surtout les ressources de la famille. Tout ceci pour déterminer les difficultés s’opposant au changement et voir quel changement serait supporté et souhaitable pour elle.
La crise est évolutive, elle implique un passage par un état critique, elle peut aussi engendrer une pathologie assez sévère.La crise n’aboutit pas forcément à un changement, elle peut se résorber, entraîner un retour à l’état antérieur et se chroniciser.

Luigi Onnis propose deux modèles systémiques sur son évolution :

  Le modèle homéostatique, où la crise reste un symptôme qui contribue à l’homéostasie familiale. Les systèmes familiaux rigides tiennent alors par des mécanismes de rétroactions négatives annulant le changement.

  Et l’évolutif, où la crise est le moment d’instabilité avec ouverture sur une possibilité d’atteindre d’autres états stables.
Si on pense l’intervention thérapeutique en terme de deuxième cybernétique, celle-ci devient une co-construction où le thérapeute, ses croyances et son modèle d’intervention joue un rôle important.
Pour conclure sur la crise, on dira avec Onnis et Cancrini (1979 ) : « le visage de la crise est celui que l’intervention thérapeutique lui donne. »

Chapitre 6 : Le problème de changement.

Dans « changements, paradoxe et psychothérapie, Watzlawick et al.s’inspirent de 2 théories mathématiques :
  La théorie des groupes qui pense le changement à l’intérieur d’un système invariant.
  Celle des types logiques qui examine la transformation quand on passe d’un niveau logique au niveau logique supérieur. Ils en déduiront 2 types de changements :

  Le changement de type 1 à l’intérieur du système qui lui ne change pas.
  Celui de type 2 qui modifie aussi le système.
Si on se penche sur les 2 types de théories précités, on peut y voir pour la première, 4 propriétés des groupes :
  La loi de combinaison interne, où le remplacement d’un élément par un autre ne produit pas autre chose qu’un élément du groupe : « plus ça change, plus c’est la même chose. »
  L’ordre des séquences des opérations n’influe pas sur le résultat. Ex cité par W. : Dans un couple, chacun porte la même accusation sur l’autre et tous les deux ont raison. Peut importe qui fait un geste de rapprochement, car toute avance de l’un est suivie d’un retrait de l’autre.
  L’élément neutre combiné avec n’importe quel élément donne ce dernier.
  L’élément est symétrique ou inverse si quand il est combiné avec un autre élément, il donne l’élément neutre. Pour W. c’est une erreur de croire que si quelque chose est mauvais, son contraire est forcément bon. l
Et pour la seconde : la théorie des types logiques, elle permet d’observer les changements qui nécessitent la sortie du système et la modification de celui-ci.
  Le changement de type 1 est annoncé par une action adaptée pour résoudre une difficulté. (le système subit une perturbation, la combinaison avec son inverse produit l’élément neutre annulant l’effet de la perturbation, le fonctionnement du système reste le même. (Exemple : enfiler un pull si on a froid).

  Dans le changement de type 2, on observe un recadrage qui transforme le contexte. Le changement permet de résoudre un problème. Et l’analyse des tentatives de solutions mises en œuvre et de leur échec est nécessaire à ce changement.
Toutefois il existe plusieurs façons de ne pas résoudre un problème.

  On peut y voir un problème là où il n’y en a pas. Par exemple, si la relation est présentée comme uniquement une source de joie profonde et d’enrichissement mutuel, à la moindre difficulté du couple, celui-ci risque la séparation. L’utopie de cette croyance ne sera alors pas remise en cause, et la frustration- agressivité vécue peut amener à une auto dévalorisation et une accusation de l’autre. Selon W. Sans la prémisse utopique, la réalité pourrait être supportable.
« Que Dieu nous donne la sérénité d’accepter les choses qui ne peuvent être changées, le courage de changer celles qui peuvent l’être et la sagesse de les différencier. »

  On peut aussi intervenir au mauvais niveau :

• Soit proposer un changement de type 2, alors qu’un changement de type 1 suffirait. Il peut aussi être inutile voire dangereux de remettre en cause le fonctionnement d’une famille ou d’un individu.
• Ou bien se contenter d’une intervention de type 1 qui répétée sans résultat risquerait d’aggraver le problème. « Faire plus de la même chose ». Un exemple de W. : un jeune couple confronté à un problème de dépendance des beaux parents. Chaque tentatives non reconnues d’indépendance déclenchait rage et frustration du couple. L’intervention thérapeutique s’est fondée sur l’importance pour les parents d’être de bons parents. Les jeunes gens ont reçu comme consigne de se soustraire à toute tâche acceptant tous les services rendus par les parents y compris financiers sans remercier vraiment. A la séance suivante, les parents outrés ont annoncé qu’il était grand temps qu’ils prennent leur vie en main. Ils peuvent ainsi rester de bons parents les aidant à devenir autonomes.

Chap. 7 pensée systémique et vie quotidienne.

L’auteur propose ici un nouvel éclairage autour de 3 pôles.
  Le changement de causalité peut apporter une ouverture intéressante : Dans la causalité linéaire, la cause précède l’effet. Or la recherche d’une cause suppose un coupable. Des lors, les protagonistes risquent la séparation avec un sentiment de frustration, d’incompréhension et d’injustice. Les familles peuvent s’en défendre par exemple en s’auto accusant ; une autre manière de réagir, la pire, serait de tomber d’accord au dépend de l’enfant. Les quiproquos de la communication sont souvent interprétés comme des agressions. Or, on remarque que quand les difficultés ne sont plus attribuées à des intensions mauvaises, il n’est plus nécessaire de s’attaquer, ni de se défendre. Il devient alors possible de travailler ensemble à la résolution et à la création d’un contexte de coopération.

  Le second, traite du rapport à la réalité.

• Si on suppose une entité comme base de l’explication, où quelqu’un a objectivement raison et cela se fonde sur une vérité extérieure, l’autre a objectivement tort : La connaissance vraie entraîne l’obéissance et donne le pouvoir.
• Par contre, si l’observateur n’est plus séparé de ce qu’il observe, il construit la vérité et elle dépend de lui. L’objectif de la discussion est alors de rechercher les points de convergence entre 2 points de vues construits par 2 personnes différentes. On est ici, dans un contexte de tolérance.

  Le dernier prend en compte la complexité, ce qui permet de dépasser les affrontements stériles et réducteurs, de sortir des visions simplificatrices qui accentuent le clivage et exacerbent les conflits ; mettant en échec toute tentative de changement.

Chap.8 Conclusion générale.

Une limite des systèmes vivants est leur indétermination. Tout système vivant est inclus ou renvoie à d’autres systèmes en interaction avec lui. La question de la limite du système se pose alors. Et la réponse est donc une décision arbitraire. La plupart des thérapeutes considèrent comme système opératoire, les personnes en interaction significative avec le patient désigné. Et le nombre de personnes à convoquer dépend de la tolérance du thérapeute.
L’auteur nous rappelle que nous ne sommes que le produit des interactions que nous entretenons avec d’autres personnes et ce dans une infinité de contextes. Cela implique donc un changement continu de soi. Pourtant Selon Mony Elkaîm, on peut réintroduire de la liberté et de la responsabilité.
En fait, on ne peut mener une vie courante en pensant que systémique ; nous avons besoin d’ouvrir le cercle et de linéariser. Nous sommes tentés de partir d’un point pour nous diriger ; agir et trouver du sens. Mais nous savons que la réalité est plus complexe, la pensée systémique peut prendre alors le relais d’une pensée linéaire causale incomplète.